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Expropriation et préemption : Acquisitions « forcées » par les personnes publiques

by | 5 octobre 2021 | Juridique & légal | 0 comments

Afin de réaliser des projets d’utilité publique (autoroutes, ponts, aérodromes, établissements scolaires, espaces verts, stades, logements sociaux, etc.), la loi donne aux personnes publiques (État, collectivités territoriales, établissements publics, etc.) des instruments juridiques leur permettant une acquisition forcée de biens immobiliers privés contre indemnisation : l’expropriation et le droit de préemption urbain. Plus rarement, l’acquisition […]

Afin de réaliser des projets d’utilité publique (autoroutes, ponts, aérodromes, établissements scolaires, espaces verts, stades, logements sociaux, etc.), la loi donne aux personnes publiques (État, collectivités territoriales, établissements publics, etc.) des instruments juridiques leur permettant une acquisition forcée de biens immobiliers privés contre indemnisation : l’expropriation et le droit de préemption urbain. Plus rarement, l’acquisition peut se réaliser à l’amiable.

 L’ACQUISITION AMIABLE

L’acquisition amiable se réalise en dehors de toute intervention du juge. Elle peut être envisagée à n’importe quel moment du processus d’expropriation.

L’expropriant propose au propriétaire un prix pour l’acquisition amiable de son bien visé par une opération d’expropriation ou de préemption.

Pressé de réaliser le projet, l’expropriant propose le plus souvent ce mode de règlement. Il rédige alors un document appelé “protocole d’accord” par lequel il fait une offre sur la base d’une évaluation du service des domaines*.

Ce qu’il faut savoir, c’est que cette évaluation est toujours inférieure à la valeur réelle du bien. Elle est même souvent inférieure à l’évaluation du service des domaines.

L’acquisition amiable a l’inconvénient de se réaliser souvent aux dépens de l’exproprié.

Concernant l’évaluation d’un bien immobilier, il est important de noter qu’elle ne peut se faire à l’instinct. Plusieurs modes d’évaluation existent et il faut savoir comparer pour choisir le mode le plus adapté et le plus avantageux pour l’exproprié. L’assistance d’un professionnel peut conduire à obtenir en moyenne 20 à 30% de plus par rapport au prix proposé par l’expropriant.

Un autre point qui n’est pas en faveur de l’exproprié, c’est la possibilité pour l’expropriant d’insérer dans le protocole d’accord des clauses douteuses telles que “la prise de possession anticipée” du bien.

L’acquisition amiable présente certes l’avantage de clore le dossier très rapidement et sans aucun frais de justice, mais elle a l’inconvénient de se réaliser souvent aux dépens de l’exproprié. En effet, les services chargés de négocier sont souvent rodés à ce type d’exercice et n’hésitent pas à faire usage de pression sur l’exproprié pour obtenir la signature d’un accord. Face à eux, l’exproprié peut se trouver démuni. Il est donc recommandé d’être vigilant.

En cas d’échec des négociations, l’expropriant engage alors la procédure d’expropriation par voie juridictionnelle.

L’EXPROPRIATION

L’expropriation se fait en deux temps : une phase administrative et une phase judiciaire.

La phase administrative

  • L’enquête publique

La première phase de la procédure d’expropriation consiste en une enquête publique qui permet d’établir la déclaration d’utilité publique. Un arrêté préfectoral ouvre cette enquête et désigne un enquêteur. Un dossier est mis à la disposition du public pendant toute la durée de l’enquête. Il se conclut par un rapport auquel sont annexées les observations du public. Il est transmis au préfet qui prend alors un arrêté déclarant le projet d’utilité publique.

Cette première enquête est accompagnée ou suivie d’une “enquête parcellaire” qui vise à déterminer avec précision les caractéristiques des parcelles à exproprier (les limites des biens expropriés, leur propriétaire et les ayants droit, le cas échéant les locataires, etc.). L’indemnisation consécutive à l’expropriation est allouée sur la base de ces informations. Cette enquête se conclut par un arrêté parcellaire qui reprend les informations recueillies pour chaque bien ou ensemble de biens.

  • Contestation de l’arrêté déclarant le projet d’utilité publique

L’arrêté déclarant le projet d’utilité publique peut être contesté devant le tribunal administratif pour en obtenir l’annulation et mettre ainsi fin de façon radicale à toute l’opération. Le recours doit être introduit dans le délai de deux mois à compter de la publication de l’arrêté prononçant l’utilité publique.

Dans la plupart des contentieux, c’est le caractère d’utilité publique qui est contesté avec des arguments souvent très factuels.

La phase judiciaire : fixation de l’indemnisation

Sans attendre la décision du juge administratif, l’expropriant, en l’absence de tout accord avec le ou les exproprié(s), transmet le dossier au juge de l’expropriation pour la fixation par voie judiciaire du montant de l’indemnisation.

Cette étape est très importante, car à défaut de pouvoir arrêter le processus de l’expropriation, l’exproprié doit pouvoir obtenir une indemnisation satisfaisante.

Devant le juge de l’expropriation, les parties (l’expropriant, le commissaire de gouvernement et l’exproprié) s’échangent des arguments au moyen de mémoires écrits. Cette première étape se conclut par un transport sur les lieux organisé par le juge, auquel toutes les parties et leurs conseils participent.

De nouveaux mémoires sont échangés entre les parties après ce transport. Par la suite, le juge fixe la date d’audience.

Les parties et le commissaire de gouvernement proposent au juge des montants d’indemnisation tirés d’informations recueillies dans plusieurs sources : ventes de biens comparables dans le même quartier, dans les quartiers limitrophes, sur le territoire de la commune, sur celui d’une commune voisine, etc. Dans cette évaluation, entrent également en compte l’état du bien, sa viabilisation, son emplacement, son environnement, son classement sur le plan local d’urbanisme, les conditions de sa desserte en matière de transports, etc. Chacune des parties propose également parmi les méthodes de calcul d’indemnisation celle qui lui est la plus avantageuse.

À noter le cas des biens interdits à l’habitation (font l’objet d’un arrêté de péril) qui sont évalués suivant une méthode dite de « récupération foncière », très défavorable à l’exproprié.

Le jugement fixant le montant d’indemnisation est rendu après une audience publique. Il peut être frappé d’appel.

LE DROIT DE PRÉEMPTION URBAIN

Alors que l’expropriation est intégralement organisée par le Code de l’expropriation, le droit de préemption, lui, est réglé par le Code de l’urbanisme et le Code de l’expropriation.

Les spécificités du droit de préemption urbain

Le droit de préemption urbain permet à une collectivité (commune ou établissement public de coopération intercommunale) d’acquérir un bien immobilier, le plus souvent en se substituant à l’acquéreur trouvé par le vendeur.

Contrairement au droit de l’expropriation qui oblige le propriétaire à vendre son bien, le droit de préemption ne peut s’exercer que si le propriétaire décide de vendre.

Il permet à cette collectivité de constituer une réserve foncière dans le but de réaliser dans le futur une opération d’aménagement (réaliser un lotissement, un ensemble scolaire, des logements sociaux, une zone artisanale, etc.). La constitution de cette réserve se réalise par la création d’une zone d’aménagement différé sur le territoire d’une commune, c’est-à-dire que la collectivité délimite une surface déterminée qui peut appartenir à une personne privée et décide de l’acquérir par préemption quand elle sera mise en vente par le propriétaire.

Contrairement au droit de l’expropriation qui oblige le propriétaire à vendre son bien, le droit de préemption ne peut s’exercer que si le propriétaire décide de vendre.

Au moment de la signature de l’acte l’authentique, le notaire chargé de la vente informe l’expropriant par un document dit “déclaration d’intention d’aliéner” (DIA). Au vu du dossier transmis par le notaire qui comporte notamment la promesse de vente sur laquelle figure le prix accepté par l’acquéreur qui sera évincé, le titulaire du droit de préemption propose alors un prix le plus souvent bien inférieur au prix figurant dans la promesse de vente.

En cas de désaccord sur le prix (ce qui est très souvent le cas), le titulaire du droit de préemption saisit le juge de l’expropriation.

Intervention du juge de l’expropriation

Dans le droit de préemption, le juge de l’expropriation intervient dans les mêmes conditions qu’en matière d’expropriation pour utilité publique : échange des mémoires entre les parties, intervention du commissaire de gouvernement, transport sur les lieux pour évaluer le bien, etc. Puis, le juge fixe une date d’audience et le montant de l’indemnisation.

Comme dans l’expropriation, ici l’évaluation est très importante, d’autant plus que certaines indemnités accordées en cas d’expropriation sont exclues en droit de préemption. C’est pourquoi, il faut être très vigilant sur la méthode d’évaluation proposée, sur les conditions de son application, sur les abattements que la collectivité tentera d’appliquer, sur les biens proposés par la collectivité comme références du prix, etc.

* Service des domaines : service de la direction générale des finances publiques. Sa compétence est nationale. Il assure plusieurs missions dont celle d’évaluer les biens qui font l’objet d’une expropriation ou d’une préemption. Il intervient devant le juge de l’expropriation.

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